L’école française s’apprête à vivre un tournant ambitieux avec la réforme de la formation professionnelle initiale, qui touche de plein fouet le métier de conseiller principal d’éducation (CPE). En effet, dès la rentrée 2026, un nouveau cadre de formation sera mis en place, cherchant à réduire la durée des études universitaires et à repositionner les professeurs et CPE au cœur d’une nouvelle dynamique managériale. Cette évolution, si elle vise l’amélioration de l’accompagnement éducatif, pose des questions essentielles sur la nature même des missions des CPE dans un contexte où l’évaluation et le pilotage prennent le pas sur l’approche pédagogique traditionnelle.
Un changement de paradigme dans la formation des CPE
Avec cette réforme, les futurs enseignants, y compris les CPE, se verront formés dès leur troisième année de licence, ce qui divise de moitié le parcours actuel de bac+5 à bac+2,5. Ce bouleversement législatif inclut une volonté manifeste de repositionner le rôle des CPE, désormais plus assimilés à des managers qu’à des éducateurs. Cela soulève des interrogations sur les compétences qui seront réellement développées et sur la place laissée à la recherche, élément clé dans la professionnalisation des enseignants.
Les enjeux de cette réforme
Il est crucial d’analyser les impacts de cette initiative. Les missions traditionnelles des CPE pourraient être redéfinies autour de quatre grands blocs :
- Bloc 1 : Piloter l’équipe vie scolaire pour le bien-être des élèves.
- Bloc 2 : Adapter les pratiques professionnelles à la diversité des élèves.
- Bloc 3 : Agir dans le cadre des principes du service public d’éducation.
- Bloc 4 : S’engager dans une démarche de développement professionnel.
Cette réorganisation pourrait entraîner une perte de l’essence même des missions éducatives au profit d’une vision managériale : sont-ce les indicateurs de performance qui guideront désormais l’action éducative ?
Une vision managériale qui interroge
Le texte de cadrage du ministère, qui règlera la formation des CPE, s’inscrit dans une logique de pilotage de la vie scolaire. Des termes tels que « culture de l’évaluation » et « pilotage de l’établissement » imprègnent le discours, délaissant la dimension éducative au profit d’une approche institutionnelle. Ce tournant soulève la question de savoir si la mission éducative des CPE ne sera pas étouffée par cette nouvelle hiérarchie des valeurs.
Bloc de formation | Volume horaire | Pourcentage du contenu global |
---|---|---|
Bloc 1 : Pilotage | 250 heures | 31,5% |
Bloc 2 : Adaptation | 250 heures | 31,5% |
Bloc 3 : Service public | 200 heures | 24,5% |
Bloc 4 : Développement professionnel | 80 heures | 12,5% |
Le cœur de métier en jeu
Le véritable défi réside dans la capacité à faire coexister les dimensions managériale et éducative. Les CPE, souvent perçus comme éducateurs, voient leur expertise remise en question. Les missions essentielles de suivi individuel et d’accompagnement collectif des élèves risquent d’être engourdies par la nécessité de démontrer une efficacité mesurable par le biais d’indicateurs.
Il devient crucial d’appeler à une réflexion sur le rôle des CPE face à cette complexité croissante. Comment défendre la légitimité professionnelle des CPE tout en répondant aux nouvelles exigences d’une institution en quête de résultats tangibles ? Le SNES-FSU a insisté sur l’importance de revaloriser le cœur même du métier.
Pour un moratoire sur la réforme
Face à cette situation, le SNES-FSU réclame un moratoire, une pause qui permettrait de repenser cette réforme dans un cadre cohérent avec les définitions classiques des missions des CPE. Pour le SNES-FSU, la formation doit s’aligner sur des standards éducatifs solides, intégrant la recherche pour assurer une réflexion critique sur le métier. Dans le contexte actuel de crise de recrutement des personnels, il est crucial de garantir une formation permettant de former des CPE compétents qui ne deviennent pas uniquement de simples gestionnaires, mais des véritables acteurs éducatifs.
En somme, des questions subsistent quant à l’avenir de ce métier fondamental. En clôturant le débat sur ces enjeux, une question cruciale reste : quel sera l’avenir des élèves si ceux qui les accompagnent et les guident sont éclipsés par une dynamique managériale ?
Source: www.snes.edu